"Seigneur, aie pitié de moi, pécheur" (2023)

Seigneur, aie pitié de moi, pécheur. C'est la prière chrétienne fondamentale et, pour la plupart d'entre nous, cela pourrait et même devrait être la dernière prière que nous prononçons avant de traverser l'abîme. Le Carême est une invitation à prendre cette prière à cœur, à s'y asseoir dans toute son ampleur, sa profondeur et son endurance.

Seigneur, aie pitié de moi, pécheur. C'est un plaidoyer complet parce que le péché se manifeste tout le temps dans nos cœurs humains et de tant de manières différentes. Ce n'est pas mal d'être contrarié, voire plein de ressentiment, lorsqu'une personne tarde à nous rembourser l'argent que nous lui avons prêté, mais c'est un péché de s'asseoir avec ce ressentiment, ou de négliger la chance que nous avons d'être en mesure de être en mesure d'aider quelqu'un dont les finances sont précaires. Ce n'est pas mal de donner de l'argent à un mendiant dans la rue, mais c'est un péché d'oublier que s'il est vraiment chrétien de donner aux pauvres, c'est le mendiant qui est semblable au Christ.

Il est compréhensible que nous regardions les informations et que nous nous émerveillions devant tout le mal qui est perpétré -- décapitations, famine, guerre -- mais quand nous devenons indifférents à ce mal, quand nous nous blottissons dans le confort de notre classe moyenne et agissons en étant lésés à cause de mesquineries choses - la personne lente dans la file des caisses, le mauvais conducteur, le serveur moins qu'attentif - nous sommes profondément pécheurs. Ici, le pape François a touché une corde sensible (j'espère !) lorsqu'il a exprimé sa consternation que ce soit une nouvelle que la bourse monte d'un point ou deux, mais ce n'est pas une nouvelle quand un être humain meurt dans la rue.

Il y a quelques mois, j'embarquais sur un vol ici à Washington. L'avion était à moitié plein quand l'un des assistants a annoncé que nous devions tous débarquer car une fissure s'était développée dans le pare-brise. Je savais que cela signifierait que je ne serais pas en mesure de prendre rendez-vous pour le déjeuner que j'attendais avec impatience - à Chicago, une pizza profonde ! - et j'ai été déçu. Mais la colère qui a explosé autour de moi était stupéfiante. Les gens étaient furieux. J'ai finalement regardé quelqu'un et j'ai dit : « Eh bien, je ne sais pas. Je suis un peu content que la fissure dans le pare-brise se soit produite alors que nous étions à la porte et non à 33 000 pieds. L'effort de nous relouer tous n'a fait qu'attiser la colère. La frustration est compréhensible. Mais vraiment, d'où vient ce sens du droit ? Nous vivons à une époque où il est relativement facile de prendre l'avion et de prendre l'avion pour voir des amis ou faire des affaires. Il y a cent ans, une telle chose était impossible, et il y a 50 ans, c'était encore assez rare. Les avions sont des choses compliquées avec beaucoup de pièces mécaniques, dont chacune pourrait mal fonctionner. Et pourquoi rendre visite à la frustration du pauvre agent qui essaie de vous aider à prendre un autre vol ? Péché.

Il y a une trentaine d'années, mon meilleur ami m'a demandé si je pouvais laisser un de nos amis communs prendre la pièce supplémentaire de ma maison. Cet ami commun se remettait d'une dépendance à la drogue et à l'alcool, et j'étais d'accord. Il était un peu irresponsable, et j'étais jeune et impatient. Mais surtout, je n'ai pas apprécié sa compagnie. Il ne lisait pas de livres, il ne se souciait ni de la politique ni de la religion, et je ne me souciais pas des stars de cinéma, ce qui lui importait le plus. Je trouvais ses préoccupations superficielles et sans intérêt. Un jour, j'ai exprimé ma frustration à mon meilleur ami, celui qui avait arrangé cela. Il m'a dit : "Michael, souviens-toi que pour lui, passer la journée est un accomplissement." Je me précipite au confessionnal le plus proche.

Seigneur, aie pitié de moi, pécheur. La profondeur du péché est différente de l'étendue du péché. La profondeur du péché n'est discernée que lorsque nous devenons vraiment honnêtes, lorsque nous admettons que ce ne sont pas les péchés de la chair ou les éclairs momentanés de colère qui nous éloignent vraiment de Dieu, du moins pas pour très longtemps. Nous savons qu'ils ont tort et cherchons rapidement le pardon du Seigneur. Non, les péchés qui nous gardent vraiment de la miséricorde du Seigneur sont les péchés qui demeurent dans nos bonnes actions, la fierté que nous tirons de nos réalisations, le jugement qui accompagne notre désir et l'articulation de la vérité (coupable ici !), le secret l'envie du succès des autres, l'ambition d'avoir plus de pouvoir et plus d'influence qui marche avec nous alors que nous entreprenons d'accomplir l'œuvre du Seigneur. Il n'y a aucune partie de nos vies qui soit au-delà de l'ombre de la Croix. Nous devrions remercier Dieu pour cela, car tout ce qui se trouve au-delà de cette ombre de la Croix se trouve également au-delà du salut de cette Croix. C'est ce que les grands antisémites du passé ont mal compris. Ils ont pris comme texte d'Ur "Que son sang soit sur nous et sur nos enfants" et ont transformé cela en un mandat pour harceler et haïr les Juifs, oubliant que nous voulons ce sang sur nous et sur nos enfants, car c'est le sang ça sauve.

Le plus mortel des sept péchés capitaux est l'orgueil, et vous pouvez le trouver parmi les personnes qui s'occupent des sans-abri ainsi que parmi les cloîtrés ainsi que parmi les habitants de la vie laïque. Ici aussi, est la racine de mon problème avec la dissidence. C'est une chose de se débattre avec un enseignement de l'Église ou de reconnaître que, dans sa propre vie, il ne semble pas fonctionner ni même s'appliquer. En ce sens, nous sommes tous des catholiques de cafétéria. Mais la dissidence n'est pas le catholicisme de cafétéria. Il ne dit pas : « Je fais de mon mieux, mais je ne peux pas me résoudre à manger le brocoli. Il dit : « Le brocoli n'a pas sa place au menu de la cafétéria parce que je ne l'aime pas.

La dissidence n'est pas un affront à "l'autorité" dans l'abstrait, mais plutôt une affirmation orgueilleuse d'être la seule personne ayant le droit de concevoir le menu. C'est mon problème avec la dissidence. Désaccord, bien sûr. En deçà, absolument. Même la conviction intime de la conscience qu'un enseignement peut ne pas être vrai, rare mais concevable. Mais la dissidence en tant que position, revendiquant le manteau de la prophétie, dans une culture qui vante la dissidence ? Non. Trop de fierté. Rappelez-vous que les prophètes étaient toujours un peu réticents, conscients du fait que l'appel qu'ils recevaient n'était pas généré par leur volonté mais venait de Dieu et était, à proprement parler, une chose formidable.

Seigneur, aie pitié de moi, pécheur. Le péché dure. Ce n'est pas définitif. Le verdict de Dieu sur Jésus de Nazareth n'était pas le verdict de l'homme sur Jésus de Nazareth et, dans sa victoire, nous savons que le péché et la mort ne sont pas les derniers mots sur Jésus et, par conséquent, ne sont pas les derniers mots sur ceux d'entre nous qui invoquent sa sainte nom. Mais le péché est avant-dernier. Nous pensons que nous devrions nous améliorer en vieillissant, devenir moins paresseux, moins envieux, moins gloutons, moins orgueilleux, mais ce n'est pas le cas. Nous voulons toujours avoir le contrôle de nos vies - et d'autant de vies d'autres personnes que nous le pouvons ! Le Saint-Père a mis en garde contre la mondanité, et c'est vraiment laid chez un homme d'église. L'une de mes grandes bénédictions dans la vie est que j'en suis venu à connaître des hommes d'Église qui exercent réellement la responsabilité et, oui, le pouvoir dans l'Église, et ils ne sont pas mondains, ils ne sont pas « politiques », ils ont vraiment abandonné leur vie au Église. Je suis sûr aussi qu'ils ont leurs tentations et leurs frustrations, mais il y a là une sainteté.

La sainteté, pour le chrétien, ne consiste pas à vivre une vie morale droite. La sainteté, pour le chrétien, réside dans l'espérance sûre que nos péchés peuvent être pardonnés, non qu'ils peuvent être évités. C'est pourquoi un exorciste doit être un saint homme, car le diable le tentera au désespoir, brandira ses propres péchés et tentera de faire croire au prêtre que ses péchés ne peuvent être pardonnés. C'est le pouvoir qui mérite le nom satanique, le pouvoir d'inculquer le désespoir. L'antidote au désespoir est la foi, l'espérance et l'amour, les trois. Ils viennent dans un paquet, et quand ce paquet a pris chair, il s'appelait Jésus. La foi, l'espérance et l'amour s'appellent toujours Jésus. Il est le "Seigneur" à qui nous parlons quand nous disons "Seigneur, aie pitié de moi, pécheur". Le remède au péché n'est pas la moralité. Le remède est Jésus et sa miséricorde. Un de mes hymnes préférés est "Rock of Ages" dans lequel nous chantons, "Dans ma main je n'apporte aucun prix, seulement à Ta Croix je m'accroche."

En ce carême, je prie pour que nous tous dans l'Église, en vue du synode d'automne sur la famille, ne nous enlisions pas dans les petits caractères de savoir si les divorcés remariés devraient ou non se voir offrir un chemin vers la communion ou si les gais et les lesbiennes devraient être "accueillis" ou "prévus". (Pourquoi pas les deux ?) Non, ma prière est que nous voyions dans ces questions précises la question plus vaste qui est au cœur du drame chrétien, la question de la miséricorde. Je prie pour que nous entreprenions le travail théologique de restauration de la miséricorde à sa place centrale parmi les attributs de Dieu, une centralité qui a trop longtemps été négligée. Je prie pour que nous examinions scrupuleusement toutes nos pratiques, disciplines et prédications et demandions si elles révèlent un Dieu miséricordieux ou une idole anthropocentrique, et développerons l'Église afin qu'elle puisse témoigner de plus près de la miséricorde de Dieu. Je prie pour être toujours plus reconnaissant et moins orgueilleux. Je prie, en somme, Seigneur, aie pitié de moi, un pécheur.